Mon enquête en Amérique latine !
Les journalistes des quatre bouts du monde commencent toujours par se poser les six mêmes questions : Où? Quand? Qui fait quoi? Pourquoi? Comment?
Ce n'est qu'un début, mais c'est un excellent début pour comprendre ce qui se passe et ouvrir de nouvelles pistes, susciter de nouvelles questions pour avancer dans l'enquête. C'est votre tour!
ACTIVITÉ 1 - Contactez-nous pour visionner une des courtes versions du film en lien avec un pays (Brésil, Pérou, Honduras). Regardez la version en classe, divisez-vous en petits groupes de journalistes. Chaque groupe doit répondre aux 6 questions fondamentales que tout journaliste doit se poser dans ses enquêtes: Où? Quand? Qui fait quoi? Pourquoi? Comment?
Comme pour tout journaliste, le temps presse: vous avez 30 minutes ! Ne cherchez pas à rédiger un texte bien écrit, mais essayez d’écrire de grandes idées à ces questions. C’est une base pour la réflexion avec l’équipe de rédaction de votre media.
Si vous avez le temps, présentez les réponses de chaque groupe en classe. Comparez les réponses et débattez en entre vous !
CHOISISSEZ UNE FICHE THEMATIQUE (ET UNE ACTIVITE)!
- EXTRACTIVISME (de ressources naturelles)
- (post-) COLONIALISME
- MONDIALISATION (et son accélération)
- DEVELOPPEMENT?
- INEGALITES ENTRE FEMMES ET HOMMES
EXTRACTIVISME
Un premier concept que nous souhaiterions que vous travailliez, et qui a vraiment été à la base de notre projet : c'est le concept de l'extractivisme. Ce terme vient du mot extraction : action d'extraire, de tirer quelque chose hors du lieu où il se trouve enfoncé, enterré. Notez qu’un suffixe "isme" est présent en fin de mot, parce que cette extraction de matières naturelles est devenue un système fondamental qui sous-tend nos économies nationales. Et ceci, souvent en omettant de tenir compte d’autres valeurs clés à respecter : droits de la nature, droits humains, droits du travail, et droits des communautés locales.
Nous vivons dans un pays où des acteurs économiques ont besoin de ressources pour produire des biens que des entreprises ou des personnes, comme vous et moi, vont ensuite acheter. Selon la Commission européenne - institution basée à Bruxelles, où tous les États de l'Union européenne sont représentés - l'Europe a besoin de 29 ressources très importantes et 14 de ces ressources ne sont pas disponibles dans le sol du contient. Ce qui amène les acteurs économiques à aller les chercher dans d'autres continents, en Asie, en Afrique, en Amérique latine.
Notre film se concentre sur le cas de l'Amérique latine. Il y a des entreprises d'Europe ou des États-Unis qui vont y extraire ces ressources. Des lois dans les Etats et des accords entre les États permettent une telle activité. Mais quand des ressources sont puisées dans une mine à ciel ouvert qui peut faire 4 kilomètres sur 10 kilomètres - c’est à dire des trous énormes ! - il y a évidemment des communautés de personnes qui sont impactées par cette activité économique. Alors, un problème est souvent généré, par exemple concernant l'eau. Par exemple, l'eau que ces communautés consomment, n’est brusquement plus disponible ou elle est polluée.
Alors ces communautés résistent, se lèvent et demandent : "Pourquoi lorsqu’une entreprise vient chez nous, nous n’avons plus le droit de vivre ?"
(post-)COLONIALISME
Le continent latino-américain a été découvert par Christophe Colomb que vous connaissez. En 1492, le grand navigateur part à la tête des trois bateaux d’une expédition au service d’Isabelle de Castille et Ferdinand d'Aragon, Rois d’Espagne. Il va tenter de traverser l'Atlantique dans la direction ouest pour rejoindre les Indes dont parle le livre de Marco Polo. Et il trouve une terre.
À côté de cette belle histoire romantique, ceux qui ont suivi la même route sont plus tard arrivés là-bas avec des armes à feu. Sur cette terre, les peuples indigènes armés de fléchettes ont dû affronter des arrivants qui possédaient déjà la poudre, des canons, des chevaux : le combat fut totalement inégal. Rapidement, génocide et dictature d’une violence rarement vue s’installent.
Les européens, principalement les Espagnols et les Portugais, sont allés prendre là-bas des ressources comme l'or, l'argent, mais aussi comme le café, le sucre, les épices. Toutes des matières en vogue et de haute valeur en Europe qui à l’époque coutaient très cher.
D’autre part, des dizaines de millions d'indigènes latino-américains – esclaves - sont morts dans les mines et les champs. Ces populations locales réduites en esclave ont ainsi été décimées. Et lorsque la main d’œuvre vint à manquer ? Les bateaux, ayant livré en Europe les matières de valeur , revenaient en Amérique latine chargés d’esclaves issus d’Afrique. Un commerce inhumain avait été mis en place par les élites de nos pays.
Au début du XIX siècle, ce sombre commerce va faire place à une vague d'indépendances : des élites locales latino-américaines ont pensé pouvoir gérer eux-mêmes les ressources locales. Pourquoi devraient-elles continuer à servir les monarchies espagnole ou portugaise ? « Ne pourrions-nous pas nous-mêmes décider de garder ces ressources ou de les vendre ?»
Et on aurait pu croire que les dirigeants latino-américains parviendraient, finalement, à décider de leur futur. Mais, au contraire, le “post-colonialisme” s’est installé. Très rapidement, il est apparu que si les Européens n'étaient plus formellement à la tête de ces pays, le continent latino américain n’était pas pour autant devenu libre de ses choix politiques et économiques.
Cela s'est même accentué à partir de la seconde moitié du XXᵉ siècle, après la Seconde Guerre mondiale. Ce n'était plus l’Espagne ou l’Angleterre qui dominait les relations internationales mais les États-Unis, qui ont favorisé une vague d'indépendances dans beaucoup de pays. Du jour au lendemain, il semblait que des personnes locales étaient finalement aux commandes du gouvernement de leur pays. Toutefois, des acteurs comme les États-Unis, les pays européens, ou même la Chine ont souvent continué à dominer les relations économiques, et même souvent politiques, avec ces pays.
MONDIALISATION
La mondialisation est un terme qui, depuis 40 ou 50 ans, est fort à la mode. On le lit et on l'entMais la mondialisation n'a pas commencé dans les années 1970 ou 1980. Elle a commencé depuis que nos ancêtres lointains, les hommes préhistoriques, ont commencé à voyager. Ils étaient nomades et ont traversé de grands espaces. On peut déjà parler d'une certaine mondialisation à l‘époque. Une mondialisation qui a progressé très lentement dans le temps et dans l’espace.
La mondialisation plus récente, celle que nous connaissons aujourd'hui, pourrait être appelée “une accélération de la mondialisation”. Christophe Colomb en partant avec ses bateaux vers l'Amérique latine ouvrit une nouvelle ère de mondialisation grâce à la boussole, l’élaboration des cartes, la construction de bateaux capables de traverser des océans… Ces nouveautés technologiques portaient à voyager beaucoup plus loin qu'auparavant. Comme si une nouvelle technologie était à la base d’une nouvelle phase de mondialisation.
Il y a une tension inhérente entre la mondialisation et nos Etats-nations (comme la Belgique). Ces derniers sont limités à un cadre géographique local, et à une dynamique politique nationale, alors que la mondialisation permet à certains acteurs d’opérer non plus à l’échelle locale ou nationale, mais internationale. Des entreprises, des mafias, des ONGs se sont mises à opérer au niveau international. Afin de réglementer cette mondialisation, les Etats-nations ont du s’adapter et former des unions au niveau international. L’Union Européenne est un des exemples d’union politique les plus avancés au monde. Une union qui reste fragile et souvent remise en question comme nous l’a montré le débat du Brexit, par exemple.
De plus, tous les pays et tous les acteurs privés ne sont pas toujours capables de s’adapter à la mondialisation, ni d’en donner le rythme. Il la subisse de plein fouet ! C’est pourquoi la mondialisation entraine également des économies à deux vitesses : ceux qui en profitent et ceux qui en paient le prix fort. Dans notre film, nous montrons que les multinationales sont dans le premier groupe alors que de nombreuses communautés de personnes locales appartiennent au second groupe.
DEVELOPPEMENT
Chaque pays semble pouvoir se développer et toujours proposer un bien-vivre qui se porte de mieux en mieux. Nous avons fait notre projet sur la base d'un livre de Eduardo Galiano qui, en 1971, il y a donc 50 ans, a écrit “Les Veines ouvertes de l'Amérique latine”. Ce livre est un grand classique en Amérique latine où il a été lu et est encore lu par de nombreuses personnes et de nombreux étudiants.
Galeano écrit que le développement, ce n'est pas toujours et dans tous les cas pour un mieux. Le sous-développement de certains pays serait maintenu en place par d’autres pays pour assurer leur propre développement économique. En d’autres termes, certains gagnent en s’assurant que les règles du jeu maintiennent d’autres en situation de défaite perpétuelle.
Le film sous-entend aussi que le continent européen bénéficie d'un développement qui est incroyable au niveau de la planète. Elle est inestimable la chance de l'accès à tant de services et de biens disponibles en Europe. Alors peut être la question insolite à se poser est la suivante: quels sont les pays qui doivent rester sous-développés pour assurer le développement de l’Union Eurpéenne?
Des institutions internationales - comme le Fonds monétaire international (FMI) ou la Banque mondiale – sortent chaque année des rapports avec, par exemple, la comparaison entre les salaires dans différents pays. Si le salaire journalier est en-dessous d’un certain montant de dollars alors le pays est considéré « sous-développé ». Sinon, il est « en voie de développement » ou il est déjà « développé ». Il y a donc des organisations supranationales qui expliquent ce qu’est le développement et comment un pays doit se développer.
Bien souvent ces rapports sont écrits dans des bureaux à New-York, Washington ou Bruxelles. Nous pensons qu'il est urgent et nécessaire d'avoir un développement qui intègre beaucoup plus les communautés locales dans tous les processus de développement. Non pas qu'une institution internationale vienne dire ce dont les populations locales ont besoin, mais que les populations locales puissent elles-mêmes trouver et exprimer ce dont elles ont besoin. C’est une condition sine qua non pour que « les veines de l’Amérique latine » cessent d’être ouvertes, comme elles le sont depuis l’arrivée de Christophe Colombe, il y a 530 ans.
INEGALITES ENTRE FEMMES ET HOMMES
Le film suit trois protagonistes, ce sont les trois actrices principales: Bertha, Carolina et Maxima. Nous avons délibérément choisi trois femmes. La raison est qu’il y a encore, au niveau de l'Amérique latine tout comme au niveau mondial, de nombreux déséquilibres entre une personne qui naît femme et celle qui naît homme, une fille et un garçon. Nous n'avons pas encore de système politique qui atteigne la capacité d'avoir et de garder un véritable équilibre en ce domaine : une sorte de système égal entre femmes et hommes. Donc en choisissant trois femmes, nous voulons apporter un message fort et le souligner.
Tout d’abord, aujourd'hui le nombre de féminicides est encore gigantesque. Le féminicide, c'est le fait que des femmes sont tuées pour le simple fait d'être femme. L'ONU, l'Organisation des Nations unies fondée en 1945, publie via ses centres de recherche à ce propos : 20 000 femmes ont été tuées pour le fait d'être femmes l'année dernière… En Amérique latine, il s’agit de 4000 femmes, c'est à dire que chaque jour, dix femmes sont tuées parce qu’elles sont femmes, qu'elles ont levé la voix, qu'elles ont fait quelque chose que des hommes n'appréciaient pas : elles meurent pour ça. Bien souvent, elles sont tuées par des membres de la famille, un conjoint, un mari, un homme. Notre film « L'illusion de l'abondance » est un appel à protéger notre planète. Mais ce film montre aussi que le rôle des femmes dans la protection de notre planète, est fondamental.
Lorsque nous sommes partis chercher l’histoire des personnes qui défendaient la planète en Amérique latine, nous sommes tombés sur énormément de femmes. Malgré que leur vie soit en danger, elles jouent un rôle primordial. Notre objectif est d’inviter les chefs d'État et les membres des parlements à lutter pour la protection des femmes, car au moment où notre société est en crise profonde, elles soulèvent des points de vue, et des regards différents sur notre société, qu’il est urgent de prendre en compte.